LES CHEVALIERS DE LA COURONNE
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de thury
Hughes de Bazouges
Jérôme C.
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SEHRI : de 1789 à 1815 - association loi 1901 :: Histoire politique, sociale et économique de 1788 à 1816 :: la Contre-Révolution en France :: L'émigration en armes
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chevaliers de la Couronne
_________________
Par définition un historien se doit d'éclairer certaines zones d'ombres du passé. Ayant de droit accès à toutes les archives ouvertes, il s'appuie sur ses recherches pour délivrer ses résultats, quitte à briser quelques clichés.
Président de la S.E.H.R.I.
LES CHEVALIERS DE LA COURONNE
Le présent article a été rédigé en hommage à mon ami Patrice Courcelle auquel nous devons deux très beaux articles sur les Chevaliers de la Couronne et les Chasseurs de Bussy, parus en 1996 et 1997 dans la revue Tradition (cf la bibliographie de la Contre-Révolution) ; il vise à compléter l’étude extrêmement détaillée du vicomte Grouvel (Les Corps de troupe de l’émigration / Armée de Condé, pp 171-182) à partir du compte rendu fait le 8 janvier 1791 à l’Assemblée nationale par la commission chargée d’enquêter sur le « prétendu » complot conduit par M. de Bussy (antérieur à celui des Chevaliers du Poignard, en date du 28 février 1791), et surtout à expliquer les organisations successives du corps et d’en déduire les différents uniformes qu’il porta.
Les circonstances de la création des Chevaliers de la Couronne à partir d’un premier corps de « volontaires de Bourbon » constituent, à ma connaissance, le témoignage le plus ancien d’une tentative de contre-révolution armée à partir d’un territoire étranger, et méritent à ce titre un intérêt tout particulier. J’ignore si le personnage du comte de Bussy a pu inspirer celui de Septime de Saint-Mayeul, héros des Volontaires du Roi (roman d’Arnaud de Lagrange et de Bernard Lugan, paru en 1989 aux Presses de la Cité) qui, après s’être illustré aux côtés de Montcalm au Canada, lutta à Paris pour défendre le Roi, à Lyon contre la Convention, et enfin dans le Bourbonnais tout au long de la Révolution… Je le signale néanmoins à toutes fins utiles à nos confrères et lecteurs qui souhaiteraient découvrir les rares romans traitant de la Contre-Révolution.
Les circonstances de la création des Chevaliers de la Couronne à partir d’un premier corps de « volontaires de Bourbon » constituent, à ma connaissance, le témoignage le plus ancien d’une tentative de contre-révolution armée à partir d’un territoire étranger, et méritent à ce titre un intérêt tout particulier. J’ignore si le personnage du comte de Bussy a pu inspirer celui de Septime de Saint-Mayeul, héros des Volontaires du Roi (roman d’Arnaud de Lagrange et de Bernard Lugan, paru en 1989 aux Presses de la Cité) qui, après s’être illustré aux côtés de Montcalm au Canada, lutta à Paris pour défendre le Roi, à Lyon contre la Convention, et enfin dans le Bourbonnais tout au long de la Révolution… Je le signale néanmoins à toutes fins utiles à nos confrères et lecteurs qui souhaiteraient découvrir les rares romans traitant de la Contre-Révolution.
Hughes de Bazouges
Brigadoon Cottage, ce 15 septembre 2013.
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L’affaire qui nous intéresse est connue grâce au rapport qui en fut fait à l’Assemblée nationale le 8 janvier 1791 (Archives de l’Assemblée nationale, volume 42). Le 12 octobre 1790, un complot ourdi par un certain « M. de Bourbon-Bussy », gentilhomme du Beaujolais, fut dénoncé à la municipalité de Valence. On prétendait que celui-ci devait avoir formé une compagnie de 200 volontaires dont l’uniforme nous est décrit comme suit : « habit vert, doublure cramoisi, revers et parements verts, passepoil cramoisi, colet [sic] cramoisi, passepoil vert, pattes à trois points sur la poche, bouton jaune avec une fleur de lys dans le champ, aiguillette et trèfle en or, et plumet blanc ». Nous citons ici le texte original car la description donnée par Grouvel présente quelques erreurs. Parmi les conjurés, les sieurs Borie et Blein, le premier ex-gendarme et le second fils d’un receveur aux péages, étaient nommés.
Cette unité devait se réunir à Besançon à une armée de 40.000 hommes placée sous les ordres de M. d’Autichamp qui commandait cette place. Pour faciliter le déplacement de cette compagnie, les volontaires devaient voyager par quatre et être protégés par 62 brigades de maréchaussée acquises à leur cause. Une fois ses forces réunies, M. d’Autichamp devait marcher sur Paris pour y libérer le Roi et dissoudre l’Assemblée nationale. Deux autres armées devaient alors pénétrer simultanément en France, l’une de 40.000 hommes sous les ordres du prince de Condé et la seconde forte de 30.000 sous ceux du comte d’Artois, frère cadet du roi.
Après avoir fait confectionner à Valence l’uniforme décrit plus haut, le sieur Borie quitta subrepticement la ville, accompagné de son seul camarade. Ce départ précipité aurait alerté les autorités et Blein fut bientôt dénoncé par un de ses amis. L’alerte fut aussitôt transmise aux gardes nationales de Besançon, Mâcon, Dijon, Lyon et au "département de Rhône-et-Loire". Le sieur « de Bourbon-Bussy » ayant été identifié par la garde nationale de Mâcon comme M. Mignot de Bussy, son château fut bientôt cerné à l’aube du 17 octobre par 200 gardes. La visite domiciliaire permit de découvrir deux tromblons, quelques fusils et sabres, des cartouches et deux barils de poudre contenant environ quatre-vingt livres, mais surtout une malle avec six uniformes correspondant à la description faite par le tailleur de Valence.
Outre le propriétaire du château de Villié, les huit conjurés arrêtés étaient « les sieurs Dubost de Curcieux, son parent ; Girier des Fontaines, ex-gendarme ; Servan, officier à la suite du régiment de Monsieur, dragons ; Chanut, maréchal-des-logis ; et Laupré, adjudant du régiment des dragons de Lorraine ; les sieurs Platet frères, habitant de Villiers , et Muzy » résidant à Villefranche. Ils furent ensuite conduits à Mâcon pour y être interrogés. « Presque dans le même temps, le chevalier de Borie [« dénoncé à Lyon comme contre-révolutionnaire »], fuyant en Savoie pour gagner Chambéry, avait été arrêté près du pont de Beauvoisin [qu’auraient dû emprunter les troupes du corps du comte d’Artois pour rentrer en France], cherchant à traverser [à pied] la rivière au gué, pour éviter l’infaillible et exacte inspection de la garde nationale de cette ville ». Il était guidé par un domestique que lui avait donné « un Anglais venu de Turin » mais, se sentant poursuivi, avait abandonné son porte-manteau – dans lequel on devait retrouver le fameux uniforme – à l’auberge où l’avait rejoint cet émissaire du comte d’Artois.
Dieu merci pour le sire de Bussy, officier au régiment de Lorraine [plus exactement major à la suite de Lorraine Dragons], ses plans avaient été jugés comme le fruit de « l’étourderie » d’un caractère « extravagant », et le président de la commission chargée d’instruire l’affaire conclut lui-même : « je commence par écarter le plan de la contre-révolution, tel qu’il est présenté par la dénonciation de Valence ; une armée de 40.000 hommes se formant subitement dans le cœur du Royaume ; deux autres grandes armées sortant, comme par enchantement, du mont Cénis [sic], et attaquant instantanément nos frontières. Tout cela me paraît aussi croyable que les contes de fées ou les miracles de Mahomet… » Il ressortait de l’enquête qu’il était connu que plusieurs châteaux du Mâconnais ayant été attaqués et incendiés en août 1789, « M. de Bussy rassembla quelques amis, quelques jeunes gens de bonne volonté, se mit à leur tête, se porta aux endroits menacés, et sans effusion de sang parvint à garantir ses propriétés et celles de ses voisins ». Ayant alors chez lui quelques uniformes de son régiment, il en aurait revêtu plusieurs volontaires pour les faire prendre pour un détachement des troupes de ligne. Il aurait ensuite acheté une pièce de drap qu’il aurait gardé pendant un an jusqu’à ce que l’annonce de nouveaux troubles l’ait décidé à faire confectionner, ouvertement, de nouveaux uniformes. Ainsi, le sieur Muzy « qui allait quelquefois au château, portait depuis près d’un an, à Villefranche, un habit de fantaisie qui ne différait de ceux qu’à fait faire M. de Bussy que par la patte des poches ; cet habit n’avait excité aucune réclamation ; il crut donc pouvoir sans inconvénient en faire faire de semblables ».
Avec un incroyable aplomb, Bussy fut en mesure de donner une explication plausible sur la présence de chacun de ses commensaux – le sieur Chanut, maréchal-des-logis de son régiment, étant autrefois chargé du recrutement, venait lui en rendre compte, et, plus récemment, il avait cherché asile auprès de son officier, après l’insurrection de son régiment… – et le plus incroyable est qu’il fut sauvé par l’excès de ce qui devait précisément lui être fatal : pour le perdre, un nommé Meiziat de la Romanèche, gagné par un certain Bévillon de Mâcon, aurait écrit une fausse lettre (reconnue comme telle lors des investigations) tendant à démontrer une relation criminelle entre M. de Bussy et le comte d’Artois… En foi de quoi, l’auteur de cette enquête recommandait que les accusés ne soient punis que de trois mois d’emprisonnement pour un crime qui ne pouvait être considéré comme de « lèse-nation ». L’Assemblée nationale fut plus magnanime puisque « après avoir entendu le rapport qui lui a été fait au nom de son Comité de recherches, décrète que le Roi sera prié de donner des ordres » afin que les prévenus soient élargis des prisons de l’Abbaye de Saint-Germain-des-Prés, et que tous leurs effets leur soient restitués…
Il nous est désormais possible d’assembler correctement toutes les pièces de cet étonnant puzzle… Dès l’été 1790, Antoine-François-Aimé de Mignot, comte de Bussy (en Bourgogne), seigneur de Bussy, la Martizière, le Sou, Fontgrenne, le Châtelard, Villié, etc. major attaché à Lorraine-dragons, connu pour ses sentiments peu favorables au nouveau régime (en particulier du fait de son attitude à l’occasion de la Fête de la Fédération), s’est déjà fait remarquer pour avoir organisé un corps de volontaires destiné à défendre les châteaux du Mâconnais contre les incendiaires et autres brigands ; il se rendit alors à Turin pour y rendre ses devoirs au comte d’Artois (et au prince de Condé qui y réside aussi). C’est alors que le frère du Roi lui aurait donné l’ordre « d’augmenter sa troupe, destinée à une entreprise que les Princes devaient tenter sur Lyon », à partir de la Savoie voisine, ce qui confirme la réalité du projet découvert mais que l’on traita avec dérision… Ce corps aurait pris le nom de « volontaires de Bourbon », d’où la confusion initiale prêtant le projet à un certain « Bourbon-Bussy », et aurait porté l’uniforme inspiré de celui des dragons de Lorraine au règlement de 1786.
Une fois libéré des geôles parisiennes, le comte de Bussy voyagea jusqu’à Chambéry où le comte d’Artois lui demanda, le 1er juin 1791, de lever un corps destiné « à la défense de la Religion et du Throne » ; composé essentiellement de gentilshommes et de « bourgeois ou propriétaires de ville ou de campagne » tirés « principalement des provinces de Dauphiné, de Provence, d’Auvergne, du Velay, de Lyon et des pays alentours » (baron de Vitrolles).
Après s’être rendu en septembre à Coblentz auprès des Princes frères du Roi pour y conclure la capitulation définitive du corps – qui comptait déjà 150 à 160 volontaires –, il obtint finalement, à la date du 15 novembre, une ordonnance de création fixant la tenue et l’organisation ; le corps des « Chevaliers-dragons de la Couronne » prétendait aux mêmes privilèges que la Gendarmerie aussi chaque cavalier avait-il rang de sous-lieutenant des dragons (confirmé le 5 janvier 1792). Or comme l’attestent plusieurs témoignages dont les Mémoires du duc d’Enghien qui découvrit le corps en janvier 1792 dans les Etats du cardinal de Rohan, cette formation, qui avait rejoint fin novembre l’armée de Condé, était alors désignée comme la « légion de Bussy ou les Chevaliers de la Couronne » et forte d’à peu près 200 hommes ; elle fut ensuite portée à près de 300 dont 200 cavaliers et une centaine de fantassins. En raison de leur nombre insuffisant, ces derniers furent réformés à la date du 1er mai 1792 pour constituer une compagnie du régiment d’infanterie noble à pied (compagnie de Corsac) tandis que les deux escadrons des Chevaliers-dragons de la Couronne étaient réunis, à la formation autrichienne d’avril 1793, à celui de Dauphin au sein d’une demi-division du Régiment noble à cheval (3e division, 1ère majore). Le projet d’une légion était donc enterré sine die…
Le comte de Bussy et le vidame de Vassé avaient tous deux le grade de colonels à la tête de ces deux unités tandis que le vicomte de Bussy, frère du précédent, et M. d’Orville étaient capitaines en premier. Le marquis de Frotté compta quelque temps parmi les Chevaliers-dragons de la Couronne mais il se retira avant la campagne d’Alsace pour rejoindre la Normandie et y organiser la contre-révolution.
Dès le mois de février 1794, le comte de Bussy entreprit des démarches afin de lever un corps de cavalerie de 1300 à 1500 chevaux au profit du duc de Saxe-Teschen, général-en-chef des forces allemandes de l’Empire, et ces tractations devaient aboutir à la création du Régiment royal et impérial des Chasseurs de Bussy, levé pour le roi de Danemark au titre de son duché de Holstein. Peu de volontaires ayant souhaité le suivre, le comte de Bussy chercha alors à quitter l’armée de Condé avec son corps, ce à quoi le prince s’opposa farouchement ; dans ses Mémoires, il décrit le comte de Bussy comme « un homme très intéressé, très ambitieux, détesté dans son corps et qui avait obtenu par ses intrigues à Heidelberg la levée d’une partie du contingent de l’Empire »… Finalement, le régiment des Chevaliers-dragons de la Couronne fut licencié à l’été 1795 et aussitôt reconstitué sous le nom de Chevaliers de la Couronne.
Inspiré de l’uniforme des dragons de Lorraine au règlement de 1786, celui des premiers volontaires de Bourbon ne survécut pas à l’aventure de 1790 et le corps en connut deux successifs : le premier (1792-1795) était très proche de l’uniforme dit des Emigrants (surtout boutonné par un seul rang de boutons) mais se distinguait par quelques traits de celui de la cavalerie noble (bouton, poches, équipage et armement, les cavaliers nobles n’ayant pas de fusils). Si l’on suppose que le corps porta initialement un casque de dragon français, cela n’a jamais été démontré ; au contraire, l’article portant sur l’uniforme mentionne un « chapeau dans la forme ordinaire, ornée seulement d’une ganse en or et d’un bouton de gilet (gravé en relief d’une couronne royale) » et portant une cocarde de basin blanc. Grouvel l’a déduit d’une illustration postérieure à la Restauration (Vernet) et du fait qu’à partir du printemps 1792, les Chevaliers-dragons de la Couronne adoptèrent (comme les légions de Mirabeau et de Hohenlohe) un casque à la Rumford au cours de leur séjour dans les états des princes de Hohenlohe (modèle très bien représenté par Patrice Courcelle). Mais aucun portrait, aucune description ou état connu d’effets personnels n’atteste de casque français aussi le réfuté-je. Ce premier uniforme, encore très français, fut remplacé en 1795 lorsque l’armée de Condé passa à la solde britannique et que le régiment fut recréé sous le nom de Chevaliers de la Couronne. Alors que l’année 1794 avait été particulièrement difficile tant pour les uniformes que pour les équipements, armes et même pour la remonte (une partie des volontaires devant alors faire le service à pied, faute de montures…), cette nouvelle formation bénéficia largement des subsides anglais et le régiment fut entièrement rééquipé (comme en atteste, par exemple, l’équipage de type autrichien), tout en conservant jusqu’en 1797 une silhouette très proche du premier uniforme.
Cette unité devait se réunir à Besançon à une armée de 40.000 hommes placée sous les ordres de M. d’Autichamp qui commandait cette place. Pour faciliter le déplacement de cette compagnie, les volontaires devaient voyager par quatre et être protégés par 62 brigades de maréchaussée acquises à leur cause. Une fois ses forces réunies, M. d’Autichamp devait marcher sur Paris pour y libérer le Roi et dissoudre l’Assemblée nationale. Deux autres armées devaient alors pénétrer simultanément en France, l’une de 40.000 hommes sous les ordres du prince de Condé et la seconde forte de 30.000 sous ceux du comte d’Artois, frère cadet du roi.
Après avoir fait confectionner à Valence l’uniforme décrit plus haut, le sieur Borie quitta subrepticement la ville, accompagné de son seul camarade. Ce départ précipité aurait alerté les autorités et Blein fut bientôt dénoncé par un de ses amis. L’alerte fut aussitôt transmise aux gardes nationales de Besançon, Mâcon, Dijon, Lyon et au "département de Rhône-et-Loire". Le sieur « de Bourbon-Bussy » ayant été identifié par la garde nationale de Mâcon comme M. Mignot de Bussy, son château fut bientôt cerné à l’aube du 17 octobre par 200 gardes. La visite domiciliaire permit de découvrir deux tromblons, quelques fusils et sabres, des cartouches et deux barils de poudre contenant environ quatre-vingt livres, mais surtout une malle avec six uniformes correspondant à la description faite par le tailleur de Valence.
Outre le propriétaire du château de Villié, les huit conjurés arrêtés étaient « les sieurs Dubost de Curcieux, son parent ; Girier des Fontaines, ex-gendarme ; Servan, officier à la suite du régiment de Monsieur, dragons ; Chanut, maréchal-des-logis ; et Laupré, adjudant du régiment des dragons de Lorraine ; les sieurs Platet frères, habitant de Villiers , et Muzy » résidant à Villefranche. Ils furent ensuite conduits à Mâcon pour y être interrogés. « Presque dans le même temps, le chevalier de Borie [« dénoncé à Lyon comme contre-révolutionnaire »], fuyant en Savoie pour gagner Chambéry, avait été arrêté près du pont de Beauvoisin [qu’auraient dû emprunter les troupes du corps du comte d’Artois pour rentrer en France], cherchant à traverser [à pied] la rivière au gué, pour éviter l’infaillible et exacte inspection de la garde nationale de cette ville ». Il était guidé par un domestique que lui avait donné « un Anglais venu de Turin » mais, se sentant poursuivi, avait abandonné son porte-manteau – dans lequel on devait retrouver le fameux uniforme – à l’auberge où l’avait rejoint cet émissaire du comte d’Artois.
Dieu merci pour le sire de Bussy, officier au régiment de Lorraine [plus exactement major à la suite de Lorraine Dragons], ses plans avaient été jugés comme le fruit de « l’étourderie » d’un caractère « extravagant », et le président de la commission chargée d’instruire l’affaire conclut lui-même : « je commence par écarter le plan de la contre-révolution, tel qu’il est présenté par la dénonciation de Valence ; une armée de 40.000 hommes se formant subitement dans le cœur du Royaume ; deux autres grandes armées sortant, comme par enchantement, du mont Cénis [sic], et attaquant instantanément nos frontières. Tout cela me paraît aussi croyable que les contes de fées ou les miracles de Mahomet… » Il ressortait de l’enquête qu’il était connu que plusieurs châteaux du Mâconnais ayant été attaqués et incendiés en août 1789, « M. de Bussy rassembla quelques amis, quelques jeunes gens de bonne volonté, se mit à leur tête, se porta aux endroits menacés, et sans effusion de sang parvint à garantir ses propriétés et celles de ses voisins ». Ayant alors chez lui quelques uniformes de son régiment, il en aurait revêtu plusieurs volontaires pour les faire prendre pour un détachement des troupes de ligne. Il aurait ensuite acheté une pièce de drap qu’il aurait gardé pendant un an jusqu’à ce que l’annonce de nouveaux troubles l’ait décidé à faire confectionner, ouvertement, de nouveaux uniformes. Ainsi, le sieur Muzy « qui allait quelquefois au château, portait depuis près d’un an, à Villefranche, un habit de fantaisie qui ne différait de ceux qu’à fait faire M. de Bussy que par la patte des poches ; cet habit n’avait excité aucune réclamation ; il crut donc pouvoir sans inconvénient en faire faire de semblables ».
Avec un incroyable aplomb, Bussy fut en mesure de donner une explication plausible sur la présence de chacun de ses commensaux – le sieur Chanut, maréchal-des-logis de son régiment, étant autrefois chargé du recrutement, venait lui en rendre compte, et, plus récemment, il avait cherché asile auprès de son officier, après l’insurrection de son régiment… – et le plus incroyable est qu’il fut sauvé par l’excès de ce qui devait précisément lui être fatal : pour le perdre, un nommé Meiziat de la Romanèche, gagné par un certain Bévillon de Mâcon, aurait écrit une fausse lettre (reconnue comme telle lors des investigations) tendant à démontrer une relation criminelle entre M. de Bussy et le comte d’Artois… En foi de quoi, l’auteur de cette enquête recommandait que les accusés ne soient punis que de trois mois d’emprisonnement pour un crime qui ne pouvait être considéré comme de « lèse-nation ». L’Assemblée nationale fut plus magnanime puisque « après avoir entendu le rapport qui lui a été fait au nom de son Comité de recherches, décrète que le Roi sera prié de donner des ordres » afin que les prévenus soient élargis des prisons de l’Abbaye de Saint-Germain-des-Prés, et que tous leurs effets leur soient restitués…
Il nous est désormais possible d’assembler correctement toutes les pièces de cet étonnant puzzle… Dès l’été 1790, Antoine-François-Aimé de Mignot, comte de Bussy (en Bourgogne), seigneur de Bussy, la Martizière, le Sou, Fontgrenne, le Châtelard, Villié, etc. major attaché à Lorraine-dragons, connu pour ses sentiments peu favorables au nouveau régime (en particulier du fait de son attitude à l’occasion de la Fête de la Fédération), s’est déjà fait remarquer pour avoir organisé un corps de volontaires destiné à défendre les châteaux du Mâconnais contre les incendiaires et autres brigands ; il se rendit alors à Turin pour y rendre ses devoirs au comte d’Artois (et au prince de Condé qui y réside aussi). C’est alors que le frère du Roi lui aurait donné l’ordre « d’augmenter sa troupe, destinée à une entreprise que les Princes devaient tenter sur Lyon », à partir de la Savoie voisine, ce qui confirme la réalité du projet découvert mais que l’on traita avec dérision… Ce corps aurait pris le nom de « volontaires de Bourbon », d’où la confusion initiale prêtant le projet à un certain « Bourbon-Bussy », et aurait porté l’uniforme inspiré de celui des dragons de Lorraine au règlement de 1786.
Une fois libéré des geôles parisiennes, le comte de Bussy voyagea jusqu’à Chambéry où le comte d’Artois lui demanda, le 1er juin 1791, de lever un corps destiné « à la défense de la Religion et du Throne » ; composé essentiellement de gentilshommes et de « bourgeois ou propriétaires de ville ou de campagne » tirés « principalement des provinces de Dauphiné, de Provence, d’Auvergne, du Velay, de Lyon et des pays alentours » (baron de Vitrolles).
Après s’être rendu en septembre à Coblentz auprès des Princes frères du Roi pour y conclure la capitulation définitive du corps – qui comptait déjà 150 à 160 volontaires –, il obtint finalement, à la date du 15 novembre, une ordonnance de création fixant la tenue et l’organisation ; le corps des « Chevaliers-dragons de la Couronne » prétendait aux mêmes privilèges que la Gendarmerie aussi chaque cavalier avait-il rang de sous-lieutenant des dragons (confirmé le 5 janvier 1792). Or comme l’attestent plusieurs témoignages dont les Mémoires du duc d’Enghien qui découvrit le corps en janvier 1792 dans les Etats du cardinal de Rohan, cette formation, qui avait rejoint fin novembre l’armée de Condé, était alors désignée comme la « légion de Bussy ou les Chevaliers de la Couronne » et forte d’à peu près 200 hommes ; elle fut ensuite portée à près de 300 dont 200 cavaliers et une centaine de fantassins. En raison de leur nombre insuffisant, ces derniers furent réformés à la date du 1er mai 1792 pour constituer une compagnie du régiment d’infanterie noble à pied (compagnie de Corsac) tandis que les deux escadrons des Chevaliers-dragons de la Couronne étaient réunis, à la formation autrichienne d’avril 1793, à celui de Dauphin au sein d’une demi-division du Régiment noble à cheval (3e division, 1ère majore). Le projet d’une légion était donc enterré sine die…
Le comte de Bussy et le vidame de Vassé avaient tous deux le grade de colonels à la tête de ces deux unités tandis que le vicomte de Bussy, frère du précédent, et M. d’Orville étaient capitaines en premier. Le marquis de Frotté compta quelque temps parmi les Chevaliers-dragons de la Couronne mais il se retira avant la campagne d’Alsace pour rejoindre la Normandie et y organiser la contre-révolution.
Dès le mois de février 1794, le comte de Bussy entreprit des démarches afin de lever un corps de cavalerie de 1300 à 1500 chevaux au profit du duc de Saxe-Teschen, général-en-chef des forces allemandes de l’Empire, et ces tractations devaient aboutir à la création du Régiment royal et impérial des Chasseurs de Bussy, levé pour le roi de Danemark au titre de son duché de Holstein. Peu de volontaires ayant souhaité le suivre, le comte de Bussy chercha alors à quitter l’armée de Condé avec son corps, ce à quoi le prince s’opposa farouchement ; dans ses Mémoires, il décrit le comte de Bussy comme « un homme très intéressé, très ambitieux, détesté dans son corps et qui avait obtenu par ses intrigues à Heidelberg la levée d’une partie du contingent de l’Empire »… Finalement, le régiment des Chevaliers-dragons de la Couronne fut licencié à l’été 1795 et aussitôt reconstitué sous le nom de Chevaliers de la Couronne.
Inspiré de l’uniforme des dragons de Lorraine au règlement de 1786, celui des premiers volontaires de Bourbon ne survécut pas à l’aventure de 1790 et le corps en connut deux successifs : le premier (1792-1795) était très proche de l’uniforme dit des Emigrants (surtout boutonné par un seul rang de boutons) mais se distinguait par quelques traits de celui de la cavalerie noble (bouton, poches, équipage et armement, les cavaliers nobles n’ayant pas de fusils). Si l’on suppose que le corps porta initialement un casque de dragon français, cela n’a jamais été démontré ; au contraire, l’article portant sur l’uniforme mentionne un « chapeau dans la forme ordinaire, ornée seulement d’une ganse en or et d’un bouton de gilet (gravé en relief d’une couronne royale) » et portant une cocarde de basin blanc. Grouvel l’a déduit d’une illustration postérieure à la Restauration (Vernet) et du fait qu’à partir du printemps 1792, les Chevaliers-dragons de la Couronne adoptèrent (comme les légions de Mirabeau et de Hohenlohe) un casque à la Rumford au cours de leur séjour dans les états des princes de Hohenlohe (modèle très bien représenté par Patrice Courcelle). Mais aucun portrait, aucune description ou état connu d’effets personnels n’atteste de casque français aussi le réfuté-je. Ce premier uniforme, encore très français, fut remplacé en 1795 lorsque l’armée de Condé passa à la solde britannique et que le régiment fut recréé sous le nom de Chevaliers de la Couronne. Alors que l’année 1794 avait été particulièrement difficile tant pour les uniformes que pour les équipements, armes et même pour la remonte (une partie des volontaires devant alors faire le service à pied, faute de montures…), cette nouvelle formation bénéficia largement des subsides anglais et le régiment fut entièrement rééquipé (comme en atteste, par exemple, l’équipage de type autrichien), tout en conservant jusqu’en 1797 une silhouette très proche du premier uniforme.
Hughes de Bazouges- determinatio
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Re: LES CHEVALIERS DE LA COURONNE
bravo !!
merci Hugues
pourrais-je le prendre pour faire une feuille de route ?
merci Hugues
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Feuille de route
Bien sur, Jérôme, pas de soucis. Peux-tu nous donner la suite de la description du manuscrit de Grammont, qui porte en marge, si je me souviens bien, "non conforme à la description donnée un peu plus loin"... afin que je puisse y ajouter un commentaire, de quoi donner du volume à ta feuille de route ?
Bien cordialement
Hughes
Bien cordialement
Hughes
Hughes de Bazouges- determinatio
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Localisation : Cambremer (14)
Re: LES CHEVALIERS DE LA COURONNE
la suite ne concerne pas "nos" chevalier de la Couronne mais un autre régiment
j'ai feuilleté plus loin et n'ai rien trouvé ...
j'ai feuilleté plus loin et n'ai rien trouvé ...
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de thury- lectio
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Pierre Baptiste- Admin
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Re: LES CHEVALIERS DE LA COURONNE
je serai curieux de savoir quels motifs ornent les sabres à garde de bataille des officiers ?
armes de france ? ou simple coquille ?
car j'ai retrouvé une garde de bataille avec armes de France qui est en train d'être restaurée avec une lame droite pleine
armes de france ? ou simple coquille ?
car j'ai retrouvé une garde de bataille avec armes de France qui est en train d'être restaurée avec une lame droite pleine
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Re: LES CHEVALIERS DE LA COURONNE
Merci à tous, je me suis régalé à cette histoire, elle va rejoindre également le site SEHRI sur les armées de la Révolution !
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secrétaire - adjoint de la S.E.H.R.I.
Laurent- inceptio
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Re: LES CHEVALIERS DE LA COURONNE
Bonsoir à tous et toutes,
Pour ce premier post, j'aimerai partager mes interrogations sur le couvre-chef des chevaliers de la couronne.
Le second et magnifique article de P. Courcelle sur le sujet (paru dans Tradition 117, décembre 96) abordait l'apparence de ce corps après 1795.
Il offrait une interprétation du casque:
Laquelle semble largement reposer sur un tableau représentant Hippolyte d’Espinchal, portrait qui selon Dimitri Gorchkoff (in Portraits d’officiers de l’armée de Condé par François-Joseph Desvernois, 1797-1798 : analyse et identification, Napoleonica. La Revue 2016/3 (N° 27), pages 44 à 61) daterait de 1807-09. Voici un détail de ce tableau avec la fameuse coiffure:
Voir: https://www.cairn.info/revue-napoleonica-la-revue-2016-3-page-44.htm
Cette représentation, comme son interprétation par Courcelle ne sont pas extrêmement convaincantes, en particulier cette plaque avant qui semble moulée sur le casque, alors que généralement, en cette fin de XVIIIème, les plaques sont plutôt plates et se courbent plus ou moins sur la coiffure. La hauteur du cimier, comme sa décoration semblent aussi, dans le portrait d'Espinchal, de la plus haute fantaisie. Courcelle lui-même semble un peu gêné par son modèle, ornant le casque d'une couronne fort peu française, et admet que le modèle paraît un peu anachronique pour 1796.
D. Gorchkoff offre en illustration de son intéressant article, un document passionnant qui décrit ce casque:
Attribué à Jean-François-Alexandre Boudet, comte de Puymaigre (1778-1843), 2e lieutenant du régiment des Chevaliers de la Couronne, ce descriptif illustré nous apporte une indication importante, les chevaliers portent le casque bavarois, c'est-à-dire le casque Rumford dont sont aussi dotés certains membres de la légion de Mirabeau.
Je n'ai pu m'empêcher (sur base d'un dessin de Courcelle et sans aucune prétention artistique) de reconstituer ce casque avec la devise qui est donnée dans le descriptif (Dieu et le roi), mais dans une partie d'une autre main et à l'évidence postérieure.
Marbot et d'autres ont offert des interprétations de ce casque, généralement dans un style franchement Restauration. Le Grouvel (dont Thury nous offre plus haut la planche peinte), se base à l'évidence sur le portrait d'Espinchal. Connaissez-vous de nouvelles sources?
Pour ce premier post, j'aimerai partager mes interrogations sur le couvre-chef des chevaliers de la couronne.
Le second et magnifique article de P. Courcelle sur le sujet (paru dans Tradition 117, décembre 96) abordait l'apparence de ce corps après 1795.
Il offrait une interprétation du casque:
Laquelle semble largement reposer sur un tableau représentant Hippolyte d’Espinchal, portrait qui selon Dimitri Gorchkoff (in Portraits d’officiers de l’armée de Condé par François-Joseph Desvernois, 1797-1798 : analyse et identification, Napoleonica. La Revue 2016/3 (N° 27), pages 44 à 61) daterait de 1807-09. Voici un détail de ce tableau avec la fameuse coiffure:
Voir: https://www.cairn.info/revue-napoleonica-la-revue-2016-3-page-44.htm
Cette représentation, comme son interprétation par Courcelle ne sont pas extrêmement convaincantes, en particulier cette plaque avant qui semble moulée sur le casque, alors que généralement, en cette fin de XVIIIème, les plaques sont plutôt plates et se courbent plus ou moins sur la coiffure. La hauteur du cimier, comme sa décoration semblent aussi, dans le portrait d'Espinchal, de la plus haute fantaisie. Courcelle lui-même semble un peu gêné par son modèle, ornant le casque d'une couronne fort peu française, et admet que le modèle paraît un peu anachronique pour 1796.
D. Gorchkoff offre en illustration de son intéressant article, un document passionnant qui décrit ce casque:
Attribué à Jean-François-Alexandre Boudet, comte de Puymaigre (1778-1843), 2e lieutenant du régiment des Chevaliers de la Couronne, ce descriptif illustré nous apporte une indication importante, les chevaliers portent le casque bavarois, c'est-à-dire le casque Rumford dont sont aussi dotés certains membres de la légion de Mirabeau.
Je n'ai pu m'empêcher (sur base d'un dessin de Courcelle et sans aucune prétention artistique) de reconstituer ce casque avec la devise qui est donnée dans le descriptif (Dieu et le roi), mais dans une partie d'une autre main et à l'évidence postérieure.
Marbot et d'autres ont offert des interprétations de ce casque, généralement dans un style franchement Restauration. Le Grouvel (dont Thury nous offre plus haut la planche peinte), se base à l'évidence sur le portrait d'Espinchal. Connaissez-vous de nouvelles sources?
henri ds- noviter veniens
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Date d'inscription : 16/11/2019
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Re: LES CHEVALIERS DE LA COURONNE
Un casque à la Rumford est bien entendu le plus probable; et le casque représenté sur le portrait d'Espinchal semble être très fantaisiste dans sa conception...Mais les sources et surtout pièces authentiques sont très rares...
Davin Didier- inceptio
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Localisation : Marseille
Re: LES CHEVALIERS DE LA COURONNE
Davin Didier a écrit:Un casque à la Rumford est bien entendu le plus probable; et le casque représenté sur le portrait d'Espinchal semble être très fantaisiste dans sa conception...Mais les sources et surtout pièces authentiques sont très rares...
Effectivement, même le casque Rumford, qui a pourtant été porté par presque toute l'armée bavaroise pendant plusieurs années, est une rareté dans les collections, on ne peut qu'imaginer la possibilité de la survie d'un casque porté par une unité d'environ 300 hommes... De plus les chevaliers de la couronne ne paraissent pas avoir été fort nombreux à se faire portraiturer, les volontaires de Mirabeau ont laissé plus de traces dans ce domaine.
henri ds- noviter veniens
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