Théodore Lemas

Théodore Lemas écrit en 1895, un livre dénommé, Un district Breton durant les guerres de l'Ouest et de la Chouannerie, 1793-1800, qui a pour sujet le district de Fougères dans le département de l'Ille-et-Vilaine.

Ce livre comporte beaucoup d'intéressants documents, Lemas citant à chaque fois ses sources, et ayant écumé les archives municipales des villages, des bourgs, du département, des bibliothèques, ayant aussi parcouru nombre d'ouvrages et de mémoires.

Il s'agit toutefois de ce que j'appelle un historien politique, et il en annonce la couleur dès l'introduction de son livre. Il dénonce les écrivains blancs avec force, les blancs sont tout au long du livre, affublés des pires épithète, scélérats, infâmes, assassins, brigands, exécrables et j'en passe. Les écrivains blancs sont critiqués parfois avec raison, toutefois Lemas se fourvoie à plusieurs reprises, son livre cherchant à montrer que les blancs, et particulièrement les chouans furent des assassins. Par une étrange naïveté, Lemas s'emploie donc à énumérer les fameux crimes, qui furent nous nous en doutons nombreux, il n'oublie pas ceux des bleus, mais les justifie par la nécessité de punir et de venger ceux des blancs. C'est ainsi qu'il raconte et énumère les exécutions, la guillotine, les fusillades, le double massacre de Fougères, celui du 3 novembre par les blancs, et celui du 18 novembre par les républicains, qui embrochent tous les blessés et malades insurgés trouvés sur place. Il cite également les documents de Chesnot qui affirme à plusieurs reprises dans ses lettres la nécessité de se passer de preuves dans l'esprit de la loi des suspects, si un homme a été arrêté c'est qu'il est coupable, et comme le déclare Kléber dans un rapport au général Rossignol du 16 avril 1794, tout le pays ou quasiment est pour les insurgés, ce qui évidemment était loin, très loin d'être vrai.


Bien sûr Lemas écrit dans le style de son temps, dans la fournaise politique qui est le propre des guerres de l'Ouest. L'immense qualité de ce livre si l'on exclue les commentaires politiciens de Lemas est d'avoir fait le travail d'historien, en fouillant les sources écrites. Dans son désir de bien faire, il affiche la guerre civile dans toute son horreur, et aligne les cotes d'archives. Avec le recul, Lemas permet donc un jugement plus serein, et la vérité se profile derrière son travail. Les paysans et les petits artisans éparpillés dans les campagnes combattent de petits notables et bourgeois et d'autres paysans et petits artisans établis dans ou autour des villes. La vengeance des uns à pour réponse les représailles des autres, les têtes sont exposées des martyrs de la guillotine, les chouans égorgent les patriotes et les laissent sur les chemins dans le même désir de mise en scène. Nous percevons comme la population fut rapidement contrainte par le sang de prendre un parti ou un autre, il devait être dur de rester neutre dans un tel climat.

N'ayant pas eu la chance comme Lemas de parcourir les archives qu'il décrit, Lemas fait aussi oeuvre de conservation, car probablement comme dans les villages de l'Ain que j'ai parcouru entre 2007 et 2010, depuis 1895, nombreux sont les documents qu'il décrit qui ont été détruis, volés, détournés. Un ouvrage d'importance donc pour le district de Fougères et pour servir à l'histoire de la Chouannerie. Je terminerais en disant que les documents d'époques que j'ai parcourus, s'ils citent les chouans, parlent bien souvent de la Petite Vendée en opposition à la Grande, celle de la Vendée militaire.